Comment préparer son avenir ?

Dans mon article précédent, je vous ai expliqué pourquoi il me paraissait nécessaire de préparer nos vieux jours. La CARPIMKO ne nous donne qu’un petit socle, pour autant qu’elle survive à la grande réforme des retraites qu’on nous annonce pour 2019. Il est donc indispensable de compléter cette petite protection sociale par soi-même.

C’est plus facile pour nous, les libéraux : nous travaillons autant que nous le voulons et nous avons une demande de soins quasiment infinie dans la plupart des endroits de France. Quand on y pense, c’est vraiment une situation enviable, d’autant que la sécu et les mutuelles rendent nos patients solvables.

Nous pouvons aussi réduire notre taux de charges professionnelles (voir cet article) pour dégager une capacité d’épargne. Beaucoup se contentent de 50 % de leur recette. D’autres gardent 70 % de chaque acte pour eux.
Nous pouvons aussi réduire nos dépenses privées
Quelques exemples :
  • changer très régulièrement de compagnie d’assurance, parce qu’elles aiment nous attirer avec un prix bas et nous matraquer par la suite ;
  • prendre une banque en ligne ;
  • ne plus avoir de téléviseur pour échapper à la redevance télé qui ne finance que les chaînes d’Etat ;
  • arrêter de fumer ;
  • profiter des achats groupés pour réduire les notes de gaz et d’électricité ;
  • prendre un forfait de téléphonie promotionnel : SFR et Bouygues proposent périodiquement des forfaits illimités à 5 € à vie, avec 20 ou 30 Go d’internet ;
  • faire la chasse aux abonnements superflus, notamment en musique et en vidéo ;
  • faire les courses au drive pour ne pas être tenté dans le magasin ;
  • ne pas se promener sans but sur les sites d’e-commerce ;
  • lire des ebooks, plutôt que des livres papier ;
  • ne pas participer à la course à la nouveauté : mon iPhone 5S de 2013 fonctionne encore très bien avec iOS 12. Et ma chaîne hi-fi de 1993 donne toujours un aussi bon son. C’est juste mon téléphone qui lui dit ce qu’elle doit jouer.

Les plus radicaux se mettent au frugalisme dans une tiny house, c’est très à la mode en ce moment.

En augmentant vos revenus et en réduisant vos dépenses, vous pourrez créer la cagnotte de la liberté dont je parlais dans cet article : combien de séances un orthophoniste doit-il pratiquer par semaine ?

Mais une fois qu’on a dit ça, on se retrouve comme Christopher McCandless devant une rivière torrentueuse en Alaska (si vous n’avez pas encore vu Into the Wild, je vous le recommande chaudement).

Faut-il prendre le risque de se jeter à l’eau ? Comment faire pour rejoindre l’autre rive sans encombre ? Y a-t-il un passage plus facile quelque part ? Comment s’y prendre quand on a d’autres priorités dans la vie et qu’on n’a reçu aucune formation financière ?

Aujourd’hui, j’entre donc dans le concret : après le « pourquoi », il est temps de s’intéresser au « comment ». Et puisque nous n’avons pas tous le même goût pour l’économie, je vous indiquerai les solutions les moins chronophages… et les autres.
Mais d’abord, un peu de géométrie :
 
C’est bien connu, surtout ici en Normandie : on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Ce triangle en est l’illustration. Tous les placements peinent à se positionner en plein centre pour cumuler sécurité, liquidité et rendement. Vous pouvez néanmoins vous y mettre en vous diversifiant. C’est ce que cherchent beaucoup de Français avec leurs deux placements fétiches :
  • L’immobilier locatif : rentable si l’emplacement et le locataire sont bien choisis, moins volatil que la bourse, mais impossible à vendre du jour au lendemain, surtout si le locataire s’accroche. Ce type de placement se situe donc en bas du triangle.
  • Les fonds en euros des assurances vie : beaucoup de sécurité et de liquidité, mais leur rendement net tourne maintenant entre 1,5 et 3 % seulement. Ces placements sont donc sur l’arête droite du triangle.

Le côté gauche du triangle fait peur aux Français : là, c’est un peu le rendez-vous en terre inconnue.

En 1990, après les vagues de privatisations, le pays comptait 7 millions d’actionnaires individuels. Il n’en reste que 3 millions (voir ici). L’alourdissement impressionnant de la fiscalité du capital et les krachs boursiers sont passés par là. Les actions détenues en direct ou dans des fonds ne représentent plus que 13 % des placements financiers. Pourtant, le patrimoine de la CARPIMKO se compose à 40 % d’actions et 44 % d’obligations, contre 9 % seulement d’immobilier (source : son dernier bulletin, page 7).

Mettons un peu d’ordre, de logique et de perspectives.
Si on regarde les choses froidement, le côté droit du triangle devrait être réservé à l’épargne de précaution (ex : jambe cassée, cabinet inondé) et à la consolidation nécessaire en fin de carrière. A 60 ans, il est temps de penser à rapatrier ses actifs dans des placements sans risques excessifs. Mais à 25 ans, miser sur les fonds en euros des assurances vie pour ses vieux jours est illogique, puisqu’ils ne rapportent plus grand-chose. Un rendement minable impose un effort d’épargne gigantesque.
Pourquoi épargner comme une grand-mère quand on est née dans les années 90 ? Autant se teindre les cheveux en gris-mauve, s’habiller chez Damart, se chausser chez un vendeur de matériel médical et regarder Motus dans un canapé en velours beige (amis des clichés, bonjour) !
Pendant la majeure partie de sa carrière, il faut absolument viser la rentabilité. Deux côtés du triangle y mènent : le bas et le gauche. Commençons par le bas.
 
Comment préparer son avenir avec l’immobilier ?
Je ne m’étendrai pas ici sur la résidence principale. On peut  la considérer comme un placement pour ses vieux jours puisqu’elle permet d’éviter de payer un loyer quand le crédit est terminé. Mais cet achat dépend de beaucoup de paramètres personnels, dont le besoin de mobilité du conjoint. Elle peut devenir une véritable entrave aux évolutions de carrière d’un salarié.
Considérons donc plutôt l’immobilier locatif. Le principe a de quoi tenter : l’achat est avancé par une banque avec des taux qui restent extrêmement bas à l’heure actuelle. Le remboursement, lui, est co-financé par le locataire et parfois le fisc.
Avant de vous lancer dans un achat d’appartement, il faut évidemment considérer l’emplacement et la demande locative, mais aussi tous les frais (taxe foncière, charges de copropriété non récupérables, assurances, entretien, remboursement du crédit, agence, huissier et avocats si ça se passe mal). Calculez si vous pourrez tenir le coup en cas d’absence de loyer. Quand on entre dans un tunnel, il n’y a pas toujours une sortie tous les 10 mètres. Un achat immobilier (ou un locataire) mal choisi peut vous pourrir la vie, au lieu de l’embellir.
Mais même sans atteindre ce nirvana de l’opération blanche, si tout se passe bien vous vous retrouverez à la fin du prêt avec un capital. Il aura été boosté par l’effet de levier du crédit (voir ici pour mon article sur ce concept) et par le co-financement du locataire.
L’Etat peut aussi vous aider. Il a mis en place différents dispositifs fiscaux incitatifs (voir ce site pour tous les détails) :
  • la loi Pinel (et sa variante Pinel Outre-Mer), pour l’immobilier neuf dans les zones à forte demande
  • la loi Malraux, pour des logements à rénover dans des « sites patrimoniaux remarquables »
  • la loi Monuments historiques, créée en 1913 pour aider ceux qui restaurent et louent ce type de bâtiment.
  • les statuts de loueur de meublé professionnel / non professionnel qui fonctionnent dans le neuf et dans l’ancien
  • la loi Bouvard-Censi, dédiée à l’immobilier meublé neuf (ou réhabilité) dans une résidence de services pour étudiants, pour personnes handicapées ou pour seniors, voire un EHPAD. Pour les résidences de tourisme, le dispositif a été modifié (voir ici).

Attention, tout de même : dans certains programmes défiscalisants, l’avantage fiscal est compris dans le prix d’achat. Quand c’est le cas, c’est juste un attrape-nigaud : au lieu d’apporter votre obole à l’Etat français, vous enrichissez un promoteur, mais le résultat est le même pour vous.

Comment faire de l’immobilier sans se soucier du quotidien ?
Le locataire qui vous embête avec un robinet qui fuit n’est pas une légende. D’ailleurs, je vis ça en ce moment. Ma locataire a laissé un robinet prendre du jeu. Au lieu de chercher à comprendre et de revisser l’écrou de la tige filetée du dessous, elle a décidé qu’elle n’y connaissait rien. Elle a laissé l’eau s’infiltrer et la rouille s’installer. Maintenant, tout est grippé et elle veut un robinet neuf.
Comment éviter ce genre de petit souci qui transforme un placement en contrainte, alors que nous subissons déjà beaucoup de stress au travail ?
La gestion par une agence est la première idée qui vient à l’esprit. Mais le rendement en prend un  coup, même si elle fait son travail correctement.
L’investissement en loi Bouvard-Censi est aussi un gage de tranquillité, puisque le locataire est la société qui fournit les services. Elle sous-loue les appartements à leurs occupants. En tant que propriétaire, vous n’avez affaire qu’à elle. Votre appartement n’a plus de sous-locataire ? Qu’à cela ne tienne, votre loyer ne change pas.
Mais pour ne s’occuper de rien, il existe une idée plus originale : la SCPI. J’ai consacré plusieurs articles aux Sociétés Civiles de Placement Immobilier (voir ici pour le premier). En résumé, ce sont des regroupements de milliers d’actionnaires qui possèdent des dizaines de biens locatifs en France et/ou à l’étranger. Le risque d’absence de loyer est donc mutualisé et atténué. Vous n’êtes pas en première ligne. Vous l’êtes d’autant moins que vous ne gérez rien : c’est une société de gestion qui le fait pour vous et qui vous reverse les loyers (on parle plutôt de dividendes, mais c’est la même chose).
Les SCPI les plus courantes possèdent des locaux commerciaux et des bureaux. Il existe aussi des SCPI défiscalisantes, basées sur les dispositifs fiscaux que j’ai listés plus haut.
J’ai acheté mes parts de SCPI grâce à un conseiller en gestion de patrimoine indépendant. Il existe aussi des courtiers en ligne : mes-placements.frmonfinanciermeilleureSCPI, etc. Les banques en vendent également.
Vous pouvez acheter vos parts à crédit, ou sans. Dans ce dernier cas, vous pouvez les héberger dans un contrat d’assurance vie pour défiscaliser les dividendes. La plupart des bons contrats d’assurance vie proposent des SCPI à l’heure actuelle.
Faut-il fuir la bourse comme la plupart des Français ?
Toutes les études le montrent : sur le long terme, les actions restent un excellent placement, rentable et liquide. C’est un peu moins vrai pour les obligations. La CARPIMKO ne s’y trompe pas, puisqu’elle investit massivement ses réserves en bourse comme nous l’avons vu.

Mais être actionnaire en direct, c’est un travail. Avant d’y investir, il faut bien analyser les sociétés ou les fonds (SICAV, OPCVM, sortes de portefeuilles d’actions et/ou d’obligations gérés par des professionnels). Il faut acheter au bon moment. Il faut ensuite surveiller ce qui s’y passe et voter aux assemblées générales. Enfin, il faut savoir bien vendre, en tenant compte des plus-values et des dividendes perçus. Tout cela s’apprend. Il existe des tas de livres, de revues (ex : Investir, Mieux Vivre votre Argent, le Revenu) et de sites internet sur ce sujet. Ça peut devenir un réel plaisir.

Si vous ne voulez pas y consacrer le temps nécessaire, vous pouvez passer à la partie suivante.

Sinon, voici les conseils de base que j’ai lus un peu partout :

  • Faites la chasse aux frais. Logez vos titres ou vos OPCVM dans un compte titre, un PEA ou une assurance vie à bas coût. On trouve surtout ça sur le web (ex : Fortuneo, Boursorama, etc.). Le PEA et l’assurance vie permettent de défiscaliser les gains. Mais le compte titre classique donne une liberté totale de manœuvre sur les marchés du monde entier.
  • Ne cherchez pas à faire des coups, vous finirez par perdre comme au casino. Même des gens aguerris comme M. Kerviel s’y sont cassé les dents. Misez plutôt sur le long terme : c’est là où les actions sont imbattables.
  • Ne négligez pas les dividendes versés par certaines entreprises : la plus-value ne fait pas tout.
  • Diversifiez vos investissements. Ne placez pas tout sur une seule entreprise, ni même sur un seul secteur d’activité ou sur un seul pays.
  • Investissez régulièrement pour lisser l’effet de yoyo de la bourse. Vous profiterez des soldes quand ça baissera.
  • Sachez prendre vos bénéfices en vous fixant des objectifs à l’avance. Si vous avez fait +50 % et que le cours plonge ensuite, votre gain sera juste resté virtuel.

Comment bénéficier de l’excellent rendement à long terme des actions quand on n’y connaît rien ?

Vous êtes vaguement tenté par les actions et les obligations, mais vous n’y connaissez rien et vous n’avez aucune envie de passer plusieurs années à apprendre ?

Il y a des solutions à votre disposition.

Vous pouvez décider de déléguer la gestion de votre PEA, de votre compte titre et/ou de votre assurance vie à des professionnels. La plupart des banques proposent des « gestions sous mandat » (voir par exemple ici pour Fortuneo). Vous pouvez même leur dire que vous souhaitez telle ou telle dose de risque, voire que vous acceptez uniquement des entreprises socialement et écologiquement responsables. A eux de se débrouiller au quotidien à votre place. Depuis quelque temps, ils sont concurrencés par les robo-advisors (voir un comparatif ici) : des sites internet basés sur des algorithmes de gestion qui se veulent puissants, intelligents… et moins chers.

Vous pouvez opter pour une tontine au Conservateur), qui est le comble de la gestion déléguée : vous vous engagez à bloquer votre argent pendant 10 à 20 ans. Soit vous y faites un gros versement dès le début, soit vous y investissez régulièrement. La compagnie fait sa sauce, puis elle revient à la fin avec un chèque pour ses clients encore vivants. Évidemment, le gros inconvénient reste l’absence de liquidité. La tontine n’est pas sur le côté gauche du triangle, elle est en bas.Vous ne voulez pas payer des professionnels, vous voulez de la liquidité, du rendement et ne rien gérer au quotidien ?

 Vous, vous êtes sûrement  un client d’Hassan Céhef.

Oui, c’est possible ! Cela s’appelle l’investissement passif. J’y ai consacré deux articles (voir ici et ici). En résumé, un investisseur passif part du principe qu’il ne fera jamais mieux que l’intelligence collective du marché et qu’il n’a qu’à suivre les indices en achetant des trackers, appelés aussi ETF (Exchange Traded Funds).

ETF, quésaco ?

Ce sont des fonds à frais très réduits qui se contentent de suivre les indices boursiers. On peut les acheter comme on achète une action Total ou LMVH. L’investissement passif le plus simple consiste à acheter un ETF qui réplique l’indice des bourses mondiales, le MSCI World. C’est un peu le CAC 40 de la planète entière. Les bonnes assurances vie proposent généralement un ETF de ce genre. Certains d’entre eux sont même éligibles au PEA (un exemple ici), grâce à un tour de passe-passe néanmoins légal. En fonction de votre peur du risque et du cycle économique, vous pourrez assortir cet ETF d’un zeste de fonds en euros.

Et c’est tout. Vous y mettez de l’argent régulièrement, vous regardez de temps en temps (surtout pas tous les jours), et ça suffit !

Bien sûr, vous pourrez par la suite remplacer votre unique ETF par d’autres, par exemple pour arbitrer entre les différents continents ou pour privilégier certaines thématiques. Il y existe des tas d’indices à suivre. Mais ce n’est pas une obligation.

Petit bémol : dans les périodes où les indices stagnent, ceux qui sont plus sélectifs peuvent gagner davantage. Mais ils peuvent aussi perdre davantage.

Si vous voulez en savoir plus sur l’investissement passif, je vous recommande chaudement les deux livres d’Edouard Petit. Le premier se présente comme une entrée en matière pour les débutants. Le second va plus loin. Cet auteur diffuse aussi un petit guide gratuit, accessible sur son site (je précise que ce ne sont pas des liens affiliés, je n’ai aucun rapport avec cet auteur).

En résumé, tout est entre nos mains, comme toujours

Nous pouvons choisir de faire confiance à la CARPIMKO (ne riez pas). Seconde option, très répandue : prendre une prévoyance Madelin pour les coups durs, un peu d’assurance vie sans risque et éventuellement un studio en ville. Troisième idée : sortir des sentiers battus et mettre en place un plan de bataille plus offensif, une véritable stratégie pour s’affranchir de l’impéritie du système obligatoire français. Il n’y a même plus besoin d’y consacrer du temps ! La vie est belle, décidément.


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