Avenant 19 : ça fait combien ?

Ce midi, j’ai reçu l’Orthophoniste de mars (oui, nous sommes bien le 4 avril).

L’Orthophoniste, c’est la revue officielle de la FNO. Je la lis depuis les années 80, grâce à mon père. Ce numéro 417 est exceptionnel parce qu’il a été envoyé à toute la profession.

C’est l’occasion d’inciter les non-adhérents à rejoindre le tiers des orthophonistes qui soutiennent la FNO par leur cotisation, en leur présentant plusieurs points importants. Citons notamment :

  • le texte d’orientation qui servira de ligne directrice au prochain bureau fédéral, qui sera élu à Arles en juin ;
  • les propositions de la FNO aux candidats à la présidentielle : des dépenses nouvelles et des questions statutaires, mais pas d’avis sur les recettes permettant de financer tout ça ;
  • des recommandations de bonne pratique sur le langage écrit ;
  • le combat pour les salariés, qui continue encore et encore (c’est que le début, d’accord, d’accord) ;
  • un tour d’horizon sur les écoles d’orthophonie qu’on n’appelle plus comme ça ;
  • une réflexion éthique sur l’accès direct (sans ordonnance) dont l’expérimentation peine à démarrer, faute de décrets ;
  • un article d’Aimé Disant moins politisé que d’ordinaire, peut-être à cause de la diffusion large de ce numéro…
  • ENFIN ET SURTOUT : un dossier sur l’avenant 19.
Tout cela permet à la FNO de montrer qu’elle travaille et qu’elle mérite notre soutien ; au minimum, en adhérant. 
 
Au maximum, on peut soutenir la FNO en y militant, d’autant que Madame Dehêtre affirme que ses revendications sont « justes » (page 3). Je ne sais pas ce qu’elle entend par là parce que cet adjectif est polysémique. Quoi qu’il en soit, c’est probablement un sens positif. Il est peu probable que le sens soit le suivant :
 
Juste : aq. Qui manque d’ampleur.
« C’est un peu juste ! ». Guillaume Lefebvre, essayant un jeans après s’être gavé de chocolats de Pâques.

 
Chaque mois, j’écris quelques mots sur la couverture de l’Orthophoniste pour pouvoir retrouver facilement telle ou telle référence. Le mois dernier, c’était « démographie ». Ce mois-ci, j’ai écrit « avenant 19 ». C’est quand même le gros changement de 2022-23.
 
Je vous passe les détails, puisque vous allez recevoir l’Orthophoniste de mars. Mais la conclusion (page 25) est une vraie punchline, comme on dit maintenant :
 
« Les seules revalorisations des actes ciblés par l’avenant 19 équivalent à un AMO à 2,90 €. En conclusion : l’ensemble des revalorisations issues des 3 avenants équivaut à une augmentation de l’AMO à 2,65 €. »
 
Ce n’est pas très clair mais si je comprends bien, une orthophoniste qui ne pratiquerait que les cotations concernées par l’avenant 19 bénéficierait d’ici le 1/07/2023 de l’équivalent d’un passage de l’AMO de 2,50 à 2,90 € (+16%). 

Avec une patientèle classique, elle aurait plutôt l’équivalent d’un passage à 2,65 (+6%). Ce n’est qu’une moyenne, donc certains seront en-dessous et d’autres au-dessus. Les plus chanceux parviendront à une augmentation à deux chiffres. Nous n’avons pas vu ça depuis longtemps !

Malheureusement, il y a un autre chiffre que nous n’avons pas pu depuis longtemps : en zone euro, l’inflation moyenne est actuellement de 7,5% en rythme annuel. Je vous recommande la lecture de cet article sur le sujet :

https://investir.lesechos.fr/marches/actualites/nouveau-record-de-l-inflation-en-zone-euro-le-pire-est-a-venir-2010186.php

En France, nous ne sommes qu’à 4,5%. Ici, en pleine période électorale, l’inflation est artificiellement abaissée par les boucliers tarifaires du gouvernement sur le gaz, l’électricité et les carburants. Les négociations de la FNO auront au moins amorti le début du retour de l’inflation. C’est déjà ça : en 2017, l’avenant 16 avait été plus décevant.

L’avenant 19 permettra donc à beaucoup d’entre nous d’absorber le choc inflationniste en cours. Si la situation économique revient ensuite à la normale, nous pourrons attendre sereinement les négociations conventionnelles de 2027 (ça a lieu seulement tous les 5 ans).

En revanche, si nous entrons dans une période d’inflation durable, nous arriverons en 2027 dans un sale état.

Certains craignent une stagflation, comme dans les années 70 : stagnation économique + inflation. Ce serait l’idéal pour ceux qui souhaitent une transition écologique intense : pour eux, la croissance est une horrible fuite en avant. Et la hausse du prix de l’énergie est un moyen de réduire nos émissions de CO2. Mais si la sécu peine à se financer, nous serons des dommages collatéraux faciles en 2027.

Plusieurs points nous poussent vers une inflation durable, d’après les économistes :

  • notre volonté de remplacer le gaz russe par le gaz de schiste américain et le gaz qatari (le Qatar est une démocratie exemplaire, comme chacun sait) ;
  • les énergies renouvelables coûtent bien plus cher que les énergies fossiles ;
  • des matières premières essentielles sont dans les mains des Russes et des Chinois ;
  • le vieillissement de la population va créer des besoins de financement énormes, avec des conséquences sur les prélèvements sociaux et donc sur les prix finaux.
Fort heureusement, nous sommes à l’époque des surprises. Elles ne peuvent pas être toutes mauvaises, tout de même. Un exemple : le vieillissement de la population, dont je viens de vous parler, a longtemps été considéré comme un élément déflationniste. Quels économistes auront raison ? Nous en aurons peut-être une idée en 2027…


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