La déclaration 2035, c’est simple.
Si, si. Essayez de remplir la liasse fiscale d’une SCI assujettie à l’impôt sur les sociétés. Et on en reparle.
Commençons par dédramatiser la situation :
LA VÉRITÉ N’EXISTE PAS
S’il y a une chose que j’ai comprise en deux décennies d’exercice libéral, c’est bien celle-ci. Une association de gestion vous dit une chose. Vous en faites part sur un forum. Et quelqu’un vous répond que sa propre AGA lui soutient une autre version. C’est ce qui s’est passé il y a deux ans avec les chèques vacances, par exemple : une partie des associations continuaient à dire que nous n’y avions pas droit, alors que d’autres affirmaient l’inverse.
Il en est de même avec les ventilations des dépenses. Certains points figurent clairement dans les textes officiels (ex : les montants de déductibilité des repas). D’autres sont sujets à interprétation, d’où les discours variables des AGA.
Il faut tout de même respecter quelques principes fondamentaux.
Pour qu’une dépense soit déductible de l’impôt sur le revenu, il faut qu’elle respecte plusieurs conditions :
- Elle doit être nécessitée par l’exercice de la profession.
- Le paiement doit être effectué durant l’année d’imposition.
- Il faut déduire le montant réellement payé (et non un devis, par exemple).
- Un justificatif doit pouvoir être fourni.
Certaines dépenses de plus de 500 € hors taxes (600 € TTC) doivent être « amorties », donc déduites sur plusieurs années. Nous y reviendrons une autre fois. Mais les autres doivent être déduites d’un coup, en les ventilant du mieux possible dans les différentes rubriques comptables.
Et si elles concernent à la fois le cabinet et votre usage privé, il faut leur appliquer une quote-part.
Voici une liste des rubriques de la 2035 et de ce que l’on peut y loger :
Achats : ce sont les fournitures et les produits revendus aux patients. Cette ligne concerne donc peu les auxiliaires médicaux.
Salaires nets et avantages en nature : il faut y noter les salaires versés après déduction des charges sociales. Celui que l’on peut verser à son conjoint entre aussi dans cette rubrique, s’il fait l’objet de versements de charges sociales. On note aussi ici les indemnités versées au personnel, les avantages en espèces (ex : ticket repas) et les aides payées au titre du chèque emploi service universel.
Charges sociales sur salaires : part patronale et part ouvrière des charges sociales liées aux salaires de la précédente rubrique.
Taxe sur la valeur ajoutée : les auxiliaires médicaux conventionnés tiennent une comptabilité hors taxe. Cette ligne ne nous concerne donc pas.
Contribution économique territoriale : on note ici la cotisation foncière des entreprises (CFE) et une éventuelle CVAE, pour ceux qui la paient.
Autres impôts : taxe sur les salaires, contribution à la formation professionnelle (payée à l’URSSAF), taxe foncière (si vous êtes propriétaire du cabinet et s’il est inscrit au registre des immobilisations), taxe d’enlèvement des ordures ménagères, malus d’une voiture (inscrite au registre des immobilisations), droits d’enregistrement et frais de timbre. Mais on ne peut pas déduire l’impôt sur le revenu, la taxe d’habitation, les pénalités de retard, ni les amendes pénales.
CSG déductible : on ne peut porter ici que la fraction déductible de la CSG-CRDS payée à l’URSSAF (6,8 / 9,7 concernant les revenus du travail). L’autre partie est perdue, considérée par le fisc comme une dépense personnelle.
Loyer et charges locatives : il ne faut pas y mettre les dépôts de garantie, qui ne sont pas déductibles. En revanche, il faut y inscrire la taxe foncière qu’un orthophoniste locataire rembourse à son propriétaire, si le bail le prévoit. Attention, si votre local vous sert aussi de logement, il faut appliquer une quote-part pour ne déduire que la partie professionnelle.
Location de matériel et de mobilier dont redevances de collaboration : attention de ne pas noter ici le leasing d’une voiture, qui entre dans « frais de véhicule ». Les collaborateurs doivent noter le total de leurs rétrocessions à part dans la case BW de la déclaration 2035, puis les incorporer avec les locations de matériel et de mobilier dans la case BG.
Entretien et réparations : ce sont les dépenses visant à maintenir en bon état les locaux, le matériel (sauf les véhicules) et les meubles. Les frais liés à un agrandissement ou à un réaménagement ne sont pas à noter ici : il faut les inscrire au registre des immobilisations et les amortir sur plusieurs années.
Personnel intérimaire : sommes versées aux entreprises de travail temporaire.
Petit outillage : il faut inscrire ici le matériel dont la valeur n’excède pas 500 € HT (600 € TTC), y compris les logiciels. Concernant les meubles, on ne peut pas déduire dans cette rubrique l’équipement d’origine du cabinet, ni un renouvellement global. Il faut alors passer par le registre des immobilisations, même en dessous de 600 € TTC.
Chauffage, eau, gaz, électricité : comme pour les loyers, si le local sert aussi de logement, il faut appliquer une quote-part.
Honoraires ne constituant pas des rétrocessions : il faut inscrire ici les honoraires correspondant à des prestations, telles que l’adhésion à une association de gestion (certaines AGA mettent plutôt ça dans Entretien et réparations) ou les honoraires d’un comptable. Ces sommes, dès qu’elles dépassent 1 200 € par an et par bénéficiaire, doivent être notées dans la déclaration DAS2, au même titre que les honoraires rétrocédés. Voir ici : https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/R14651
Primes d’assurances : il s’agit notamment de l’assurance responsabilité civile professionnelle et de celle du cabinet. Si l’on est propriétaire et que le local est inscrit au registre des immobilisations, l’assurance des murs doit aussi être inscrite ici. Comme toujours, en cas d’usage mixte du local, il faut déduire la seule partie professionnelle. Attention, il ne faut pas porter ici les assurances Madelin, qui sont des charges sociales facultatives, ni l’assurance des véhicules, qui entrent dans la rubrique « frais de véhicules ».
Frais de véhicule : on met ici le total des frais réels, ou les frais kilométriques issus du barème officiel (voir ici).
Autres frais de déplacement : ce sont les frais de voyages professionnels, hors frais de véhicule : transport en train, péages, parking, taxi, métro, hôtel…
Charges sociales personnelles obligatoires : il s’agit des cotisations à la CARPIMKO et à l’URSSAF, dont on aura ôté la CSG-CRDS, la contribution aux URPS et la CFP. La CSG-CRDS déductible dispose de sa propre rubrique, comme on l’a vu. La contribution aux URPS doit être reportée dans « cotisations syndicales et professionnelles ». La contribution à la formation professionnelle entre dans « autres impôts ».
Charges sociales personnelles facultatives : on place ici les cotisations déductibles dans le cadre de la loi Madelin : contrats retraite, prévoyance, complémentaire santé.
Frais de réception, de représentation, de congrès et de repas : comme toujours, ces frais ne sont déductibles que s’ils présentent un rapport direct avec la profession. La loi permet d’y inclure les frais de repas pris au restaurant durant des formations ou des congrès, ou pris à domicile pour un « repas d’affaires ». En revanche, les frais de repas, de transport et de séjour du conjoint ne sont pas déductibles. Concernant les frais de repas pris au cabinet, ils sont très réglementés. Il faut absolument qu’ils ne soient pas le résultat de convenances personnelles : l’éloignement entre le cabinet et le domicile doit être réel, sans pour autant être démesuré. Il faut aussi pouvoir produire tous les justificatifs, comme pour toute dépense professionnelle. Si ces deux conditions sont réunies, on peut déduire la partie de la dépense de repas située entre 4,80 et 18,60 € (montants de 2018 pour la déclaration 2019). Exemples :
- Pour un repas à 8 €, la déduction sera de 8 – 4,80 = 3,20 €.
- Pour un repas à 20 €, le plafond sera retenu et la déduction sera de 18,60 – 4,80 = 13,80 €.
Fournitures de bureau, frais de documentation, de correspondance et de téléphone : les fournitures de bureau, comme le petit outillage, ne peuvent être déduites que si elles restent sous la barre de 500 € HT (600 € TTC). La documentation n’est déductible que si elle présente un rapport avec la profession, mais la jurisprudence admet aussi de noter dans cette rubrique les revues généralistes ou enfantines déposées dans la salle d’attente. Concernant la téléphonie, cela englobe aussi l’accès internet et un éventuel fax. Comme toujours, si l’usage est mixte, il faut appliquer une quote-part pour ne pas déduire l’utilisation personnelle.
Frais d’acte et de contentieux : on enregistre dans cette rubrique les frais de greffe (ex : constitution d’une SCM) et d’enregistrement d’actes notariés liés à la profession (ex : achat d’une place de parking), lorsqu’ils ne sont pas effectués lors de l’installation. On y entre aussi les éventuels frais de contentieux professionnels.
Cotisations syndicales et professionnelles : il s’agit des cotisations à la FNO ou à la FOF, mais aussi à des associations comme Orthophonistes du Monde ou ORA. On y loge également la partie de la cotisation URSSAF qui sert à financer les URPS (qui sont des sortes d’associations professionnelles obligatoires inventées par Roselyne Bachelot avant qu’elle quitte le navire).
Autres frais divers de gestion : on y trouve, pêle-mêle :
- les frais d’inscription à l’association des chèques vacances (ANCV) ; je consacrerai prochainement un article à ce sujet, si la loi de finances 2019 nous permet de continuer à en bénéficier
- les cadeaux professionnels
- l’achat de cartes de crédit
- les pourboires
- l’achat et le blanchissage de vêtements de travail, s’ils sont réellement nécessités par l’exercice de la profession (ex : une blouse blanche), ce qui s’avère assez rare en orthophonie
- les annonces dans la presse locale (attention de ne pas tomber dans la publicité)
- les frais de déménagement du cabinet
- la formation professionnelle du titulaire, de son conjoint-collaborateur et de ses éventuels salariés
- les frais d’études universitaires si on a perçu un revenu non commercial dans la même année.
Frais financiers : on déduit dans cette rubrique les intérêts des emprunts contractés pour les dépenses d’installation (y compris le local s’il est inscrit au registre des immobilisations), pour un droit de présentation ou pour l’acquisition de parts dans une SCM ou une SCP. On y note aussi les frais de banque et les agios et intérêts de découverts bancaires, s’ils ne font pas dû à une convenance personnelle (ex : vider artificiellement le compte professionnel pour placer des sommes à titre privé).
Pertes diverses : on entre ici tout ce qui n’entre pas dans les rubriques précédentes, comme par exemple le vol de matériel professionnel. Mais l’indemnité versée par l’assurance doit être entrée dans les recettes. Les vols d’espèces au cabinet ne sont pas déductibles, en revanche.
Frais d’établissement : ce sont les dépenses effectuées lors de l’installation du professionnel. On y trouve les frais d’acquisition des éléments affectés à l’exercice du métier (commissions, frais notariés), les frais de « premier établissement » (frais de prospection, de recherche, d’étude) et les frais de constitution d’une société. Les frais de premier établissement peuvent être étalés sur un à cinq ans, sur simple demande au fisc. Si des frais d’établissement sont constatés avant le début de l’activité, ils créent un « déficit catégoriel » que l’on impute sur le revenu global.
Dotation aux amortissements : l’amortissement de l’année, concernant les biens immobilisés (ex : un ordinateur qui dépasse 500 € hors taxes). Ce montant est calculé dans la page 2 de la 2035.
OUF ! Nous voici enfin en bas de la liste. Et si vous voulez encore plus de détails, je ne peux que vous conseiller ce PDF.